Avant de commencer cette partie, il nous parait essentiel de rappeler la définition de la déviance. Est considéré comme acte déviant un acte qui s’écarte des normes établies par la société, qui se détache des mœurs établis dans un pays. Une déviance est établie par deux moyens : d’une part la loi en vigueur l’établit clairement dans ses textes, en déclarant interdite un acte donné, et d’autre part par les considérations des individus, par les jugements qu’ils portent à cet acte. A noter que ces deux aspects peuvent se « contredire », comme avec l’exemple donné précédemment avec la loi relative au tabac. Il apparait d’ailleurs que ce type d’opposition ne dure jamais très longtemps, la loi s’adaptant à l’avis populaire, ou vice-versa. L’origine de la déviance est communément nommée la théorie de l’escalade. Simplement, elle représente la croyance que la consommation de cannabis entraine presque systématiquement la consommation de drogues dures et pousse au crime.

 

Ce graphique illustre bien à quel point cette pensée est considérée comme vraie par les individus :

 

http://tpe-droguesdouces.cowblog.fr/images/Image8-copie-1.jpg






































Autre mot que nous jugeons utile de définir, la législation : il s’agit de l’ensemble de lois en vigueur dans un pays. Quand on parle de « législation relative aux drogues », on s’intéresse donc à toutes les lois qui concernent les drogues, qu’elles soient répressives ou pas.

La première chose qu’il convient de dire dans cette partie est qu’il n’existe aucune législation européenne commune à tout les membres de l’Union européenne.

En France, la loi majeure concernant le cannabis, qui fixe les sanctions relatives à la consommation date de 1970. Il est très important de préciser un aspect de cette loi : distinction n’est pas faite entre drogues douces et drogues dures, ce qui signifie concrètement qu’un consommateur d’héroïne subit théoriquement les mêmes peines qu’un consommateur de cannabis, de cocaïne ou de toute drogue. Elle repose sur 4 axes :

-pénalisation de l’usage (puni par un an d’emprisonnement et 3750euros d’amende au maximum, et 2 ans ainsi que 4500 euros d’amende quand il y a conduite sous influence de stupéfiants) avec un système de doublage des peines en cas de récidive.

-alternative de soin à la sanction de l’usage appelée "injonction thérapeutique". (A noter que toute personne se présentant spontanément à ces services de cure bénéficient de l’anonymat et de la gratuité des soins, il n’y a pas d’intervention judiciaire, administrative.)

-répression sévère du trafic et de ses profits (les petits dealers risquent 75 000 euros d’amende et 5 ans de prison, de même pour ses complices. Les « producteurs » et fabricants illicites risquent quant à eux jusqu’à 20 ans de prison et 7,5 millions d’euros d’amende, et parfois risquent la perpétuité.)

-interdiction de la publicité pour l’usage et le trafic des stupéfiants, assimilée à une provocation.

 

Cette législation, même si elle est restée fondamentalement inchangée depuis 1970, a subi quelques modifications . A différentes dates, il y a d’abord eu la « création » de nouveaux délits (comme le délit « d’offre et cession pour usage personnel », c’est-à-dire le délit de vente de cannabis à un tiers). La répression du trafic par la police s’est aussi accru. On peut citer comme exemple à ce durcissement la «  loi sur la prévention de la délinquence » du 5 mars 2007 (et son décret d’application le 27 septembre de la même année), qui vise à redonner force à l’interdit social par des sanctions plus crédibles et des réponses mieux adaptées. L’aggravation de peine concerne notamment les infractions à l’égard des mineurs ou dans les écoles. Les applications de cette loi, soit la répression des drogues, ne s’arrête pas aux limites de la France. En effet, en Europe, il existe des « plans d’actions » qui ont pour objectif de renforcer la coopération internationale sur la lutte anti-drogue, comme celui mis en place en 2005-2008 et celui actuellement en vigueur, jusqu’en 2012. L’objectif à long terme est surtout de réduire l’offre et la demande présente sur le marché du cannabis.

Quand on voit les dispositifs mis en place par cette loi, on peut se remémorer la classification scientifique faite en introduction et faire un comparatif. Rappelons le, cette hiérarchisation plaçait, en 1998, le cannabis comme une drogue plutôt inoffensive à petite dose, à l’inverse de l’alcool, de l’héroïne et de la cocaïne considérées comme très dangereuses. On voit donc que la loi en place en France n’est pas vraiment en accord avec cette hiérarchisation. Certes, ce type de classification n’est pas considéré comme une référence par tous, mais s’y référer permet de constater que le cannabis, considéré peu dangereux, est interdit en France quand l’alcool ou le tabac, considérés nocifs, sont légalisés.

Cependant, la pensée scientifique ne régit pas la législation. Comme rappelé en transition, le facteur majeur, qui pèse lourd sur les décisions des lois, est la considération sociale. Le graphique suivant nous donne un aperçu de cette perception du danger par la population :


http://tpe-droguesdouces.cowblog.fr/images/Image2.jpg





















Sur ce graphique, il apparait que le cannabis est considéré plus dangereux que le tabac et l’alcool. 62% des individus interrogés le considère comme nocif dès l’expérimentation, pour 43% avec le tabac et seulement 10% pour l’alcool . 

Ce type de graphique illustre plutôt un accord avec la loi en place, le
tabac et l’alcool étant légalisés quand les trois drogues considérées comme les plus dangereuses sur ce graphique, à savoir le cannabis, l’héroïne et la cocaïne sont interdites.


http://tpe-droguesdouces.cowblog.fr/images/sondage2.jpg





On observe que sur les reponse sondés la majeur partie du panel
situent "le cannabis" dans une drogues douces.





Seulement, il convient d’aller plus loin, et nous allons maintenant étudier la mesure de la déviance de la consommation de cannabis à l’échelle sociale, afin de vérifier si la déviance établie par la loi est considérée comme valable aux yeux des individus.

En France, on considère qu’il n’y a pas de consensus commun quant à un changement de loi, que ce soit un durcissement des peines ou une dépénalisation, c’est-à-dire une consommation , certes limitée, mais rendue possible sans risquer de sanction.

Pour illustrer ceci, nous avons trouvé les deux graphiques suivants :

http://tpe-droguesdouces.cowblog.fr/images/Image5.jpg
























http://tpe-droguesdouces.cowblog.fr/images/Image16.jpg
























Le premier d’entre eux donne donc des données, à partir d’un échantillon de gens interrogés par les organismes OFDT et EROPP, quant à la pensée des gens sur trois types de changement de loi relative aux cannabis : La première ligne concerne un mouvement vers la dépénalisation, la seconde vers un durcissement et la troisième vers une légalisation. Les données sont également classées en trois dates bien définies et espacées dans le temps : 1999, 2002 et 2008. Enfin, les avis diffèrent d’un avis tout à fait favorable au changement à un avis défavorable, en passant par les nuances « plutôt d’accord » et « plutôt pas d’accord ». Nous considèrerons d’une façon large les avis « plutôt d’accord » et « d’accord » comme communs, ainsi que les avis « plutôt pas d’accord » et « pas d’accord ». Sur ce graphique, on voit par exemple que 31% des avis sont favorables à une dépénalisation contre 69% en 2008, autant sont d’accord avec la phrase « l’interdiction du cannabis est une atteinte à la liberté individuelle », qui traduit donc une volonté de durcir les peines. On remarque tout de même que seulement 15% des avis sont favorables à une légalisation de la vente du cannabis en France, en 2008, ce qui ne constitue qu’une petite minorité. Les deux premiers chiffres donnés traduisent cependant bien l’idée que tout le monde n’est pas d’accord sur un changement de loi. Remarque, entre 1999 et 2008, les avis relatifs à la dépénalisation et au durcissement ont très peu évolués : 66% défavorables à une dépénalisation en 1999 pour 69% en 2008, et 67% des gens étaient défavorables à un durcissement de la loi en 1999 contre 69% en 2008. Ceci traduit quelque part que l’idée commune à propos des drogues est « figée ».

Le second document, en provenance des organismes OFDT et EROPP en 2008 (+ 1999 et 2002 pour les deux chiffres concernant cette période), illustre aussi cette idée, bien qu’il insiste un peu sur les avis qui concernent le rejet de la dépénalisation. A noter que sur ce tableau, nous n’étudierons que la colonne de pourcentages, l’autre ne servant pas à nos recherches. Premiers chiffres que nous allons étudier sont classés en fonction de l’âge. On voit qu’entre 15 et 25 ans, 51% des avis rejettent une dépénalisation. Bien que l’avis soit donc partagé à cet âge, on voit que plus la catégorie interrogée est âgée, plus l’avis général se tourne vers un rejet global de la dépénalisation : de 26 à 45 ans, 63% des avis rejettent la dépénalisation, allant jusqu’à 77% de réponses contre la dépénalisation dans la classe d’âge de 65 à 75 ans. Deuxième classification de données intéressantes que l’on obtient grâce à ce graphique, le rejet de la dépénalisation selon le niveau d’études : 54% rejettent la dépénalisation au dessus d’études de type « Bac +3 et plus » contre 73% avec un niveau « CAP BEP » ou 60% avec le niveau « BEPC ». On peut tirer une conclusion telle que plus le niveau d’études atteint est élevé, moins les avis sont en accord avec des mesures prohibitives à l’encontre des drogues, en accord donc avec le genre de classification scientifique faite en introduction, l’inverse étant vrai aussi : moins le niveau d’études est élevé, plus la confiance en la législation est forte.

En couplant ces deux documents, on a donc une impression que l’avis populaire penche plutôt vers une loi « figée », car rappelons le, s’il n’y a pas de majorité favorable à une dépénalisation, il n’y en a pas non plus qui prône un durcissement de la répression (Graphique étudié ci-dessus). Ainsi, la loi se trouve confortée par une confiance plutôt majoritaire de la part des individus.

Nous allons maintenant étudier la minorité non négligeable qui cherche tout de même à obtenir des concessions de la loi et qui essaye de faire changer les réactions qu’on peut nommer « réprobations morale » .

 

On sait que les consommateurs de drogues douces sont sujets à des réprobations de la société. On distingue des réactions formelles, des réactions informelles.

On entend par réaction formelle une forme de sanction pénale, judiciaire. Dans cette catégorie on peut distinguer encore deux sous types de réactions : les réactions formelles non punitives pouvant être un avertissement judiciaire, un traitement médical imposé en milieu libre ou fermé et les punitives, plus sévères, allant de l’amende à la peine d’emprisonnement. On voit que ce type de réactions peut aller jusqu’à la peine de mort dans des pays avec des législations différentes par exemple l’Egypte .

Puis dans un second temps, on a les réactions punitives informelles, celles que la législation ne décide pas. Ces réactions ne sont pas immuables. Elles peuvent prendre la forme directe: l’indifférence, l’arrêt de fréquentation, le rejet. La seconde catégorie consiste à passer par des « intermédiaires » comme des associations tel que le Pelican, sur Chambéry, qui n’ont pas pour but de juger, ni de punir mais bien d’aider le consommateur à contrôler son addiction au travers d’un traitement thérapeutique.

http://tpe-droguesdouces.cowblog.fr/images/sondage1-copie-1.jpg

Réponses du sondage vis à vis des sanctions des consommateurs. On remarque que la sanction majoritaire est "une amende". ce qui montre l'avis mitigé entre une sanction pénale et une sanction non punitive.


 










http://tpe-droguesdouces.cowblog.fr/images/Image1.jpg

Mais une minorité ne trouve pas nécessaire de punir les consommateurs de drogues douces. Nous allons étudier un document qui va nous permettre de comprendre pour quelles raisons cette minorité cherche à éviter les sanctions pénales systématiques des consommateurs sans réellement chercher à comprendre leurs motivations.



http://tpe-droguesdouces.cowblog.fr/images/Image12.jpg



















Ce graphique édité par OFDT et EROPP en 2008 prend en compte les motivations de consommation des usagers de différentes substances dangereuses allant de l’alcool (dans ce cas, relevant de l’alcoolisme) au cannabis en passant par l’héroïne et la cocaïne. Le panel de personnes interrogées lors de la fabrication de ce sondage donne effectivement leurs avis sur les facteurs déclencheurs d’addiction, qui peut être due à un milieu familial difficile, à une maladie et dans ce cas à la recherche du soulagement dans la douleur. Certains pensent que la prise de substances nocives ou illicites relève d’un choix personnel et assumé qui ne nuit pas à l’individu vivant normalement. D’autres pensent que ce choix de consommer ces substances met en danger leur entourage qui est exposé aux effets psychomoteurs ou psychologiques subis par l’individu. De ce graphique, nous n’allons étudier que les données concernant le cannabis. Il est à noté que ce graphique est un questionnaire à choix multiple.

Les données sur le cannabis montrent que 62% du panel interrogé pensent effectivement que les consommateurs de cannabis sont un danger pour leur entourage, on peut donc imaginer que ceux-là sont plutôt favorables aux sanctions pénales ou plus généralement aux sanctions punitives, sans prise en compte de l’individu en lui-même. Malgré cette majorité, on peut remarquer que 50% pensent que la consommation de cannabis relève de problèmes personnels, d’un quotidien difficile (problèmes familiaux, maladie…) et que 16% du panel croit qu’un consommateur peut vivre normalement. Ce qui fait une moyenne de 66% qui serait plutôt favorable, à priori, à l’assouplissement des sanctions punitives, ou à une aide en fonction de l’individu, de sa situation, qui selon eux, doit être pris en compte.


Aujourd’hui, cette prise en compte de l’être humain dans la sanction est de plus en plus présente, avec des organismes, des associations, qui cherche à aider les consommateurs. Des campagnes de prévention sont également mises en place par les ONG. On sent une avancé réel traduite nottament par le changement du 5 Mars 2007 déjà évoquée précédemment. Rappelons le, cette modification engage des alourdissement de peine notamment pour la conduite après la prise de stupéfiants. Mais un engagement majeur de cette loi est le développement des injonctions  thérapeutiques c’est-à-dire des aides aux consommateurs dépendants. Le procédure est en effet simplifiée avec la création de « médecins relais ». Ce sont des intermédiaires médicaux qui n’ont pas pour but de juger mais bien d’aider à comprendre et combattre les addictions. Autre exemple flagrant d’une ébauche de changement, la circulaire du 8 avril 2005 diffusé par le ministre de la Justice : «

l’esprit de la politique choisie par le gouvernement en matière de répression de la consommation de drogues est d’afficher un discours de fermeté mais de privilégier les réponses sanitaires. »

Un acte déviant, rappelons-le, est défini par les lois qui le concernent et sa considération sociale. Dans ce TPE, nous avons tenté d’étudier les différents aspects. En conclusion, on peut dire que, de nos jours, en 2011, consommer du cannabis est un acte déviant : la législation le condamne et les différentes données étudiées dénotent que socialement, n’est pas approuvé par tout un chacun. Cependant, les changements de lois évoqués précédemment montrent que les lois ne sont pas immuables et que peut-être des changements, des assouplissements ne sont pas a exclure ainsi la déviance n’est pas inaltérable, sempiternel.

<< Article précédente | 1 | 2 | Article suivante >>

Créer un podcast